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Information juridique
Le fait que les travailleurs sans droit de séjour bénéficient des mêmes droits du travail que tout travailleur n’est pas connu de tous. Les informations juridiques reprises ci-dessous vous informe sur le manière dont la loi s’applique à ce groupe de travailleurs.
Droit à un salaire pour les travailleurs sans droit de séjour : Loi du 11 février 2013
Les travailleurs sans droit de séjour ne sont pas exclus de l’application de la loi concernant la protection de la rémunération des travailleurs et ont donc droit à un salaire pour leurs prestations de travail.
Une protection spéciale du droit au salaire pour les travailleurs sans droit de séjour est par ailleurs prévue dans la Loi du 11 février 2013 prévoyant des sanctions et des mesures à l’encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour illégal.
Cette loi transpose partiellement la Directive 2009/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 18 juin 2009 établissant des normes minimales pour les sanctions et mesures à l’encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier.
Bien que cette loi impose en premier lieu des obligations à l’employeur, elle prévoit clairement des droits pour les travailleurs sans droit de séjour.
Champ d’application
La loi du 11 février 2013 s’applique aux « ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ». On entend par là : les étrangers qui ne remplissent pas ou plus les conditions d’entrée et de séjour sur le territoire. Les demandeurs d’asile et les étrangers résidant légalement ne relèvent donc pas du champ d’application de la loi.
Droit au paiement de l’arriéré de salaire
Dans la loi du 11 février 2013, il est, pour la première fois, explicitement reconnu que les travailleurs sans droit de séjour ont non seulement droit à un salaire, mais aussi à ce que ce salaire soit équivalent à celui d’un salarié légalement occupé.
L’article 4 précise : « L’employeur établi en Belgique et qui, dans le cadre d’un contrat de travail, y occupe un ressortissant d’un pays tiers en séjour illégal lui paie une rémunération équivalente à celle qu’il est tenu de payer à un travailleur occupé légalement dans le cadre d’une relation de travail comparable en vertu d’une ou des sources des obligations dans les relations de travail entre employeurs et travailleurs visées à l’article 51 de la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires. »
Présomption d’occupation de trois mois
La loi du 11 février 2013 introduit une présomption réfutable qu’un salarié sans droit de séjour a effectué pendant au moins trois mois des prestations de travail. Il appartient donc à l’employeur d’apporter la preuve du contraire. Compte tenu de la charge de la preuve souvent lourde et difficile qui incombe en pratique aux travailleurs sans droit de séjour pour démontrer la période travaillée, cette présomption constitue une protection minimum importante.
L’article 7 prévoit : « Lorsque le ressortissant d’un pays tiers en séjour illégal est occupé en Belgique dans les liens d’un contrat de travail, il est présumé, jusqu’à preuve du contraire, y avoir effectué des prestations pendant au moins une durée de trois mois.»
Responsabilité de chaîne : Entrepreneurs et sous-traitants
La loi du 11 février 2013 introduit également la responsabilité solidaire des clients et des (sous) contractants pour le remboursement des salaires des travailleurs sans droit de séjour. Cette responsabilité solidaire s’applique à partir du moment où le client a eu connaissance de l’emploi d’employés sans droit de séjour.
« Art. 35/11. § 1. Le donneur d’ordre qui a connaissance du fait que son entrepreneur occupe un ou plusieurs ressortissants d’un pays tiers en séjour illégal, en l’absence d’une relation de sous-traitance, solidairement responsable du paiement des salaires encore dus par son entrepreneur qui se rapporte au travail effectué à partir du moment où il était au courant du fait précité et exécuté dans le cadre de son accord avec ce contractant. La preuve de cette connaissance peut être la notification visée à l’article 49/2 du Code pénal social. »
« Le donneur d’ordre qui a connaissance du fait que le sous-traitant intervenant directement ou indirectement après son entrepreneur occupe un ou plusieurs ressortissants d’un pays tiers en séjour illégal, est, en cas d’existence d’une relation de sous-traitance, solidairement responsables du paiement des salaires encore dus par le sous-traitant susvisé qui se rapporte au travail effectué en sa faveur à partir du moment où il était au courant du fait précité. La preuve de cette connaissance peut être la notification visée à l’article 49/2 du Code pénal social. »
Prescription arriérés de salaire
Les procédures durent souvent longtemps, ce qui signifie qu’une fois qu’un dossier de paiement d’arriérés de salaire est porté devant les tribunaux, il peut parfois être question de prescription.
En principe, les actions en justice découlant d’un contrat de travail sont prescrites au bout d’un an. Mais comme le non-paiement des salaires est également un délit, un délai de prescription plus long, de cinq ans, s’applique.
En cas de délit de non-paiement du salaire, le délai de prescription de cinq ans de l’article 2262bis, §1, deuxième alinéa du Code civil s’applique à la place du délai de prescription raccourci de l’article 15 de la loi du 3 juillet 1978.
Ceci a été confirmé par la Cour de cassation dans les arrêts du 14 janvier 2008 (Cass. 14 janvier 2008, JTT 2008, 302) et du 20 avril 2009 (Cass. 20 avril 2009, Pas . 2009, 967):
- Le non-paiement du salaire est un délit (conformément aux dispositions pénales de la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires et la loi du 12 avril 1965 sur la protection de la rémunéraition des travailleurs) afin que le salarié, le cas échéant, en vertu de l’article 3 de la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du code de procédure pénale, ait droit à réparation du préjudice résultant de ce délit.
- Article 26 du titre préliminaire du code de procédure pénale stipule que« L’action civile résultant d’une infraction se prescrit selon les règles du Code civil ou des lois particulières qui sont applicables à l’action en dommages et intérêts. Toutefois, celle-ci ne peut se prescrire avant l’action publique. »
- Conformément à l’article 2262bis, §1, deuxième alinéa du Code civil: « toute action en réparation d’un dommage fondée sur une responsabilité extra-contractuelle se prescrit par cinq ans à partir du jour qui suit celui où la personne lésée a eu connaissance du dommage ou de son aggravation et de l’identité de la personne responsable. »
- L’article 15 de la loi sur les contrats de travail stipule que «Les actions naissant du contrat sont prescrites un an après la cessation de celui-ci ou cinq ans après le fait qui a donné naissance à l’action, sans que ce dernier délai puisse excéder un an après la cessation du contrat. ». Les actions en justice mentionnées ici qui découlent du contrat de travail ne sont que des actions en réparation de dommages fondées sur la responsabilité contractuelle.
- L’article 26 du titre préliminaire du code de procédure pénale et l’article 2262bis, §1, deuxième alinéa du Code civil incluent toute action civile fondée sur des faits prouvant l’existence d’un délit, même lorsque ces faits indiquent également une responsabilité contractuelle et que l’objet de l’action concrète vise l’exécution d’obligations contractuelles à titre de réparation du préjudice subi.
- L’article 15 de la loi sur les contrats de travail n’est donc pas une loi spéciale au sens de l’article 26 du titre préliminaire du code de procédure pénale.
Les personnes sans droit de séjour ont droit à un avocat pro deo, aussi pour faire les aider à respecter leurs droits du travail. Ils peuvent bénéficier d’une assistance juridique gratuite, totale ou partielle, s’ils leurs moyens d’existence sont inférieurs au seuil.
Il doit être démontré que le client dispose de moyens de subsistance insuffisants. Cela est souvent difficile à prouver pour les personnes sans droit de séjour. En principe, cela peut être démontré par tous les moyens de preuve possibles. Notre expérience montre que (une combinaison de) différents documents peuvent(peut) servir de preuves : par exemple un certificat d’assistance médicale urgente du CPAS, une déclaration sur l’honneur, des certificats d’organisations humanitaires (par exemple, nourriture, nuitée), etc.
De plus, les personnes sans droit de séjour ne sont souvent pas en mesure de présenter certains certificats (comme un certificat de composition de ménage) car elles ne sont souvent pas enregistrées auprès de l’administration communale. En principe, cela ne fait pas obstacle à une nomination pro deo, pour autant qu’il puisse être démontré que les moyens de subsistance sont insuffisants.